Le projet Bois énergie Sahel, soutenu par l’Agence française de développement (AFD) et le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM), s’attache à préserver les forêts du Sahel en favorisant une meilleure gestion. Il s’appuie pour cela sur deux satellites d’observation.

Cet article a été publié sur le site www.afd.fr

Au Sahel, le bois reste le combustible de cuisson principal utilisé par plus de 90 % des ménages. Sa collecte massive est l’un des principaux facteurs de dégradation des forêts dans cette région. Entre 2000 et 2020, le Niger, le Burkina Faso et le Mali ont ainsi perdu près de 15 % de leur surface forestière. Cette situation a des impacts négatifs importants tels que la réduction de la biodiversité, la hausse des émissions de gaz à effet de serre ou la perte de revenus. Ce mode de cuisson entraîne également une exposition répétée aux fumées de cuisson, néfastes pour la santé, les femmes étant les premières concernées.

Néanmoins, la prise de conscience des dommages de cette surexploitation forestière s’accélère au sein de la population, des communes et de l’administration. Un terrain propice pour le lancement d’initiatives de protection des forêts, à l’image du projet Bois énergie Sahel mené au Niger et accompagné par l’Agence française de développement (AFD) et le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM).

L’un des objectifs du programme est de faciliter l’accès à du bois de combustion durable, afin que 50 % du bois de cuisson utilisé dans la capitale Niamey soit issu d’espaces forestiers gérés durablement (contre 5 % aujourd’hui). « Le Sahel est une zone d’intervention prioritaire pour l’AFD sur cette thématique vu le rythme soutenu de dégradation des forêts », souligne Damien Delhomme, chef de projet à la division Énergie de l’AFD.

Repérer la déforestation à l’hectare près

Pour atteindre cet objectif, l’État du Niger s’appuie sur deux alliés très haut placés : les satellites d’observation de la Terre Sentinel-2 (A et B), pilotés par l’Agence spatiale européenne. En comparant les clichés pris chaque semaine par ces instruments, l’administration forestière nigérienne sera capable de repérer à l’hectare près de nouvelles zones touchées par la déforestation. « Les satellites permettent d’objectiver la surveillance des forêts, et leur appui est désormais envisageable dans le cadre d’un projet financé par un bailleur. Les images utilisées sont gratuites », explique Damien Delhomme.

Les données collectées seront mises à disposition du grand public via une plateforme web. En quelques clics, les habitants pourront ainsi observer l’évolution des forêts autour de leur commune via leur smartphone. Cette application permettra également un suivi rapproché de l’espace boisé pour les collectivités locales, ainsi que pour l’administration déconcentrée et centrale, responsable de l’exploitation de la ressource en bois énergie.

Mieux tracer les flux sur les marchés de bois

Pour améliorer la gestion de cette ressource, afin de la préserver, la première étape consistera à définir des règles d’exploitation : carte d’occupation des sols, évaluation de la productivité, quotas annuels d’exploitation… Les données envoyées par les satellites Sentinel-2 permettront d’actualiser ces quotas chaque année en faisant office de tiers indépendants.

Le programme Bois énergie Sahel s’appuie sur les retours d’expérience d’un précédent projet pilote, Fonabes, mené au Niger, au Burkina Faso et au Mali par le Centre de coopération international en recherche agronomique (Cirad), grâce au financement du FFEM. Il soutiendra notamment la structuration de marchés ruraux du bois et sera doté d’un statut de personne morale à même de gérer une plateforme de dépôt-vente à l’échelle d’une commune. Objectifs : mieux tracer les flux en termes de prix et de quantité, collecter des taxes au profit de la commune et former les bûcherons à l’exploitation durable de la ressource.

Ces dépôts-ventes auront donc des quotas à respecter, suivis par la commune et contrôlés par l’administration forestière grâce à un système d’information traçant les transactions. Au Niger, là où ils existent déjà, la plupart des transporteurs préfèrent d’ailleurs travailler avec ces marchés ruraux.

Lancer une dynamique dans les communes voisines

Le programme a officiellement débuté en avril 2022. Il est financé grâce à plusieurs subventions de l’AFD et du FFEM d’un montant total de 8 millions d’euros. Deux conventions de financement ont été signées dans ce cadre, avec l’État du Niger pour la gestion durable des forêts et avec le consortium formé par Hystra, le Geres et Entrepreneurs du monde pour l’appui à la distribution de foyers améliorés, économes en combustibles.

L’enjeu est aussi de pouvoir encourager les populations locales aux bonnes pratiques de gestion durable des forêts. « Il faut arriver à mettre en place un système d’incitation pour gérer durablement la ressource, espère Guillaume Salle, responsable équipe projet au sein de la division Agriculture, développement rural et biodiversité de l’AFD. Le projet permettra d’accompagner les populations rurales à travers la diversification de leurs sources de revenus. Si la moitié des communes voisines de la capitale Niamey emboîtent le pas sur ce système, alors une dynamique sera lancée. »