À l’occasion de la journée internationale des énergies propres, intéressons-nous au projet ZEMBO impulsé en 2019 à Kampala grâce au soutien du FFEM, dont l’enjeu est de développer la transition énergétique de l’Ouganda via le secteur du transport.
Kampala est une ville qui présente un trafic urbain extrêmement dense : on estime que près de 350 000 motos-taxis à moteurs thermiques circulent aujourd’hui dans ses rues. Si ces transports sont essentiels pour l’accessibilité et l’activité économique de la ville, ils génèrent une très grande pollution atmosphérique et sonore qui affecte la santé de la population locale. Afin de pallier ces émissions, la start-up ZEMBO propose depuis 2019 la location et la vente de motos-taxis électriques rechargeables sur un réseau de stations bénéficiant de stockage photovoltaïques (en cas de coupure du réseau).
Conformément à sa volonté de tirer des enseignements des projets qu’elle soutient et d’encourager le passage à l’échelle de solutions innovantes, le FFEM se penche aujourd’hui sur les résultats de l’initiative ZEMBO, cinq années après son démarrage.

Il ressort de l’évaluation que cette initiative offre une réponse adaptée aux besoins économiques des conducteurs de motos-taxis de la capitale, les boda-bodas, et qu’elle a su innover en combinant le développement de véhicules, les solutions de financement et le service de recharge, tout en contribuant à la diminution de la pollution atmosphérique.
Ainsi, en cinq ans ce projet a permis de :
- Proposer une alternative écologique et fiable aux moteurs thermiques très polluants, et ainsi amener à une diminution significative des émissions de gaz à effet de serre (grâce au mix essentiellement hydroélectrique très peu carboné de l’Ouganda et au relai d’appoint photovoltaïque en station)
- Améliorer le revenu quotidien des boda-bodas grâce à la diminution de divers coûts liés au transport (coût de l’énergie, entretien du véhicule…) et à créer des emplois localement pour le montage des e-bodas et l’usinage de certaines pièces
- Développer un modèle commercial intégrant un système de micro-crédit, qui favorise autant l’inclusion financière que la sécurisation des remboursements
- Encourager une transition énergétique durable, par l’adoption de l’approche « pay-as-you-go » afin de garantir la traçabilité et le traitement responsable des batteries à leur fin de vie.
Ces impacts positifs sont néanmoins à nuancer au regard de facteurs limitants, observés à différentes échelles : à échelle de la politique publique de transport, le rôle transformationnel d’un « jeune » opérateur privé de mobilité reste marginal, à échelle de l’offre locale de mobilité électrique, l’interopérabilité des batteries entre les concurrents n’est pas (encore) assurée et le réseau de « swapping des batteries » reste peu étendu et bien inférieur à l’offre traditionnelle de pompes à essence, ce qui limite l’attrait de la solution électrique pour les motos-taxis.
L’expérience menée aux côtés de Zembo, montre qu’offrir une solutions de mobilité électrique réellement propre et abordable est possible à condition de réunir certaines conditions : un mix électrique décarboné, un coût plus attractif de l’électricité au regard des carburants, une offre de financement et de paiement adaptée qui assure le bon entretien et la récupération des batteries, mais également une prise en compte des pratiques des utilisateurs (autonomie et facilité de recharge), afin de lever les freins psychologiques à l’abandon des véhicules thermiques. Dans les contextes urbains, les motos-taxis électriques peuvent donc apporter une partie de la solution en matière de pollution atmosphérique et sonore dès-lors qu’ils trouvent leur place dans l’organisation globale du système de transport.
, précise Aurélie Ghueldre, responsable du projet auprès du FFEM.
Cette expérience pilote de cofinancement d’une start-up de mobilité électrique en Afrique reste un exemple singulier pour le FFEM, qui a permis de comprendre les rouages et la complexité de ces modèles économiques naissants.
Dans une perspective de passage à l’échelle, la coopération entre les jeunes acteurs de ce secteur et avec les autorités organisatrices des transports apparait clé pour améliorer la couverture des stations de swapping/recharge et leur interopérabilité, agir sur l’accidentologie et la sécurité des deux-roues (formations, matériel, etc.), définir la place des motos-taxis électriques et plus globalement des deux-roues dans le système global de transport.
L'évaluation du projet ZEMBO fut réalisée en août 2024 par TRANSITEC, et sera disponible prochainement sur notre site internet.