Les territoires ruraux des régions de la Mé, de la zone de biodiversité du Mont Tingui en Côte d’Ivoire, et celui du complexe écologique Pô-Nazinga-Sissili (ou PoNaSi) au Burkina Faso sont soumis à des pressions anthropiques croissantes. La déforestation et la dégradation des forêts qui en résultent menacent la santé des écosystèmes critiques qu’elles abritent. De fait, l’avenir des communautés qui en dépendent pour leur alimentation, leur énergie et leurs revenus, est menacé.
Dans ce contexte, le projet soutenu par le FFEM en partenariat avec l’association NITIDAE et l’Union européenne vise à consolider l’approche « paysage » déjà mise en œuvre dans ces trois aires protégées et leur zone périphérique. Il s’agit là de formaliser des outils nécessaires à l’émergence de filières zéro déforestation, conciliant développement durable et préservation des ressources naturelles.
Le projet est ainsi composé de 4 axes d’intervention :
- Consolider la planification territoriale concertée intégrant les enjeux de conservation de la biodiversité, en ciblant l’émergence de dialogues structurés et en apportant des réponses concrètes à des enjeux fonciers clés.
- Renforcer la gestion des aires protégées et développer des méthodes innovantes pour le suivi et la surveillance de la biodiversité dans les paysages concernés.
- Impliquer les producteurs et acteurs des filières agricoles dans les paysages du projet par une approche globale et critique visant à promouvoir une agriculture sans déforestation.
- Mesurer l’impact environnemental du projet et construire un référentiel « Territoire zéro déforestation » pour dupliquer les démarches proposées.
Après le lancement du projet sur les aires protégées du Mont Tingui en Côte d’Ivoire, et du complexe écologique Pô-Nazinga-Sissili (ou PoNaSi) au Burkina Faso, les interventions débutèrent fin 2021 sur la 3ème aire protégée de la région de Mé et visent la conservation et le développement autour de la Réserve Naturelle de Mabi-Yaya, gérée par de l’Office Ivoirien des Parcs et Réserves (OIPR), partenaire de l’association NITIDAE. Ces actions s’inscrivent dans la continuité du projet REDD+ de la Mé (PRM) soutenu par l’Agence Française de Développement (AFD) entre 2016 et 2020.
Les premiers résultats sur cette dernière aire protégée sont prometteurs sur l’ensemble des axes d’interventions.
Dans le cadre de la consolidation de la planification territoriale concertée, un processus participatif avec les habitants a permis la validation des 7 plans de développement local et l’identification de 12 domaines d’actions comme l’éducation, l’agriculture, la santé et l’hygiène, les routes et transports ou l’environnement.
Je remercie l'ONG Française NITIDAE de nous avoir accompagné dans l'élaboration et la finalisation du PDL (plan de développement local) de Bassadzin. Non seulement il permet aux générations actuelles et futures de connaître l'historique du village mais il nous permet également de connaître les atouts de notre village, de recenser les difficultés auxquelles nous sommes confrontées, nos besoins et ainsi chercher à apporter des solutions tout en suivant une programmation. Ce PDL est pour nous un repère, un guide qui va nous conduire au développement économique, social et culturel de notre village avec l'aide de nos partenaires
confie Nanan" N'CHO N'cho Armel "Katako", chef de village de Bassadzin, 61 ans, Instituteur à la retraite.
Dans chacun des 7 villages concernés, 10 projets prioritaires de développement local ont également été proposés tel que par exemple la construction d’un centre de santé dans le village de M’Bohoin, la construction d’un château d’eau solaire à Arounankro ou la construction et l’équipement de trois écoles primaires à Danguira. « A l’horizon 2032, Danguira deviendra un pôle agricole et forestier dynamique de la région de la Mé, et un exemple de cohésion sociale et de modernité durable » ambitionne l’assemblée villageoise.
L’accompagnement à l’innovation et à la diversification des producteurs agricoles à travers la réhabilitation de vieilles parcelles de cacao est également encourageant avec la réhabilitation des 47 premières parcelles en 2022 dont 7 exploitées par des femmes. En 2023, 80 nouvelles parcelles sont en cours de réhabilitation dont 11 exploitées par des femmes, disposant d’un hectare chacune pour autant de bénéficiaires.
Le reboisement forestier a également débuté avec 8 hectares réalisés sur l’année 2022 et l’identification de 22 hectares sur l’année 2023. En complément, la formation de 40 alerteurs communautaires a été faite afin de sensibiliser l’ensemble des communautés et de contrôler localement les pratiques illégales, et d’inciter à de nouvelles pratiques écoresponsables.
A ce jour, les experts en télédétection de l’association NITIDAE ont pu par ailleurs organiser et animer 2 sessions de formation et de renforcement des capacités des agents de l’OIPR, plus particulièrement les agents de la Réserve naturelle de Mabi-Yaya. L’enjeu est de rendre la surveillance du territoire et de la Réserve plus autonome et efficace et ainsi de contribuer à la préservation de la biodiversité de la Réserve.
Ces premiers résultats démontrent la pertinence du choix audacieux et inédit de passer d’une approche filière à une approche paysage pour lutter contre la déforestation dans un territoire.
Les prochaines étapes sont tout aussi ambitieuses avec la mise en œuvre d’un projet d’infrastructure par village, le développement d’activités rémunératrices, la poursuite de la réhabilitation des parcelles de cacao grâce à de nouvelles plantations comprenant par exemple l’association de deux cultures, le cacao et l’hévéa. La poursuite du reboisement va également être accélérée avec la mise en place de nouveaux partenariats avec le secteur privé.